Le digital est incontournable pour les assurés d’aujourd’hui et de demain. C’est dans ce contexte, à travers un entretien exclusif pour 212assurances, que Hassan Boubrik, DG de la CNSS, s’est livré sur ce dossier prioritaire du digital, et qui accapare toutes les forces vives de la Caisse. Où cette mue électronique révolutionnaire de la CNSS nous emmène-t-elle à l’orée de 2024?
La CNSS a annoncé en marge du projet structurant de la généralisation de la protection sociale, un vaste plan de transformation digitale. Quels en sont les contours et à quel horizon ?
Hassan Boubrik:
Une première phase du grand chantier royal de la généralisation de la protection sociale a été quasiment achevée avec l’intégration des travailleurs non-salariés et des ex bénéficiaires du régime d’assistance médicale. Il s’en est donc suivie une augmentation forte des assurés couverts par la CNSS, et du flux d’activité. Du coup, la digitalisation et la dématérialisation des process devenait une nécessité, et ce pour 3 raisons prioritaires:
- Maitrise des coûts
- Faire face au flux énorme d’activité qui a évolué en si peu de temps
- Maintenir une qualité de service vis-à-vis de nos assurés et de nos affiliés.
D’où ce chantier très vaste de transformation digitale de la CNSS. Il faut rappeler que la CNSS avait déjà commencé en 2002 avec un premier portail, DAMANCOM, pour la déclaration des salariés et le paiement des cotisations par les affiliés, les entreprises et les employeurs. Ainsi, sur cette période passée de 20 ans, de nouveaux outils digitaux sont venus s’implémenter.
Un plan sur 5 ans avec une accélération du digital pour de meilleurs services aux assurés et affiliés
Depuis, une accélération est devenue obligatoire avec 3 axes :
- Offrir une qualité de services la plus élevée possible grâce à nos outils digitaux : Une digitalisation orientée vers une qualité de service offerte aux assurés et aux affiliés. Dématérialiser l’ensemble des process pour que chaque population n’ait pas à se déplacer physiquement en agence, et de pouvoir tout faire de chez soi en accédant aux portails et aux applications sur smartphones. Les affiliés également
- Deuxième axe : Toujours grâce à la digitalisation, c’est l’utilisation de la Data et des données récoltées pour améliorer l’efficacité du système. Cela concerne une vision 360° sur les assurés, les affiliés, dans le domaine de l’assurance maladie, également sur les prestataires de soins. Nous souhaitons optimiser avec cette Data une meilleure gestion des différents régimes que nous avons. En assurance maladie, par exemple, cela permet de déceler plus rapidement d’éventuelles incohérence et d’anticiper, mais aussi de combattre la fraude. Aujourd’hui, cette masse de données que nous récoltons nous permet d’améliorer globalement l’efficacité du système. La CNSS se transforme d’un établissement administratif qui gère des dossiers sur la base de la conformité, à un véritable assureur dans les différents domaines (Assurance maladie, retraite, IPE, …), et qui anticipe le risque en apportant une vraie valeur ajoutée à la protection sociale de manière générale.
- Sur les 5 prochaines années, nous sommes engagés sur un plan de transformation digitale. Nous avons identifié sur ce plan une cinquantaine de « Use case* » bien définis, avec leurs budgets. Une fois implémentés, ces projets transformeront de manière profonde la manière dont la CNSS travaille. Ce qui accompagnera aussi une perception différente de la CNSS par les différentes parties prenantes, car il leurs sera apporté une énorme valeur ajoutée.
Un bond de géant avec un seul espace centralisé pour toutes les plateformes, applications et portails de la CNSS
Au niveau des outils utilisés, le portail Damancom est toujours dédié aux affiliés. Ces derniers y font de la télédéclaration et leur télépaiement. Cela représente 98% des entreprises et employeurs qui l’utilisent. C’est logique, car c’est devenu obligatoire sur un plan réglementaire.
Il y a eu un tel engouement pour cet outil de liaison, que du coup, Il y a moins d’un mois, une nouvelle refonte de Damancom a démarré. C’est un travail assez lourd, qui correspond à 18 mois de travail, avec une réécriture, une refonte totale de l’application pour une meilleure ergonomie, et un développement de fonctionnalités plus riche.
La CNSS va sortir aussi l’application MACNSS et les portail MACNSS qui sont dédiés aux assurés avec là aussi, une nouvelle refonte totale dans quelques semaines pour une ergonomie et une utilisation plus intuitive.
En fait toutes les applications vont être unifiées sur un seul espace. Dès lors, on aura sur notre portail un socle technologique qui est très récent, très sécurisé, et avec plus de fonctionnalités et d’ergonomie, le tout, dans un esprit plus intuitif.
212assurances: Aujourd’hui, est-ce que toutes les populations qui se connectent sur vos applications, peuvent les utiliser facilement, quel que soit le niveau culturel de l’utilisation du digital.
Hassan Boubrik:
On se rend compte, que quelque soit le niveau d’utilisation du digital de nos assurés, les ex-ramédistes, qui ont maintenant basculé dans le système AMO-TADAMON, sont ceux qui ont créé le plus de comptes MACNSS, soit à ce jour, 1,9 millions de comptes créés. Cela fait un total, toute population confondue, de 4,5 personnes enregistrées sur MACNSS. 9 millions de téléchargements ont été enregistrés depuis que l’application est en place, et nous sommes passés à 1,4 millions de connexions mensuelles.
Le portail TAAWIDATY, mis en ligne récemment, permet une dématérialisation de toutes les prestations du régime général. Par exemple, pour liquider une pension, demander des allocations familiales ou l’IPE (Indemnité de perte d’emploi), vous pouvez tout faire de chez vous, même scanner les documents téléchargés. Ce début octobre, il y a déjà 37% de demandes dématérialisées. Cela facilite ainsi la vie à nos assurés, et permet une réduction des coûts de traitement.
2024 : Feuille de soins électronique
Il reste encore la prestation de l’AMO à dématérialiser, sur laquelle nous travaillons actuellement. Il faut savoir que la feuille des soins papier coûte très cher, et entrave la qualité de service des délais de traitement. Avec le papier, on est en moyenne à 9,5 jours de délais de traitement. Le but final, est de tout centralisé sur une seule plateforme pour dématérialiser l’ensemble de nos prestations. La feuille de soins papier n’existera plus à terme en 2024 pour développer cette qualité de services.
Et demain, pourquoi pas, l’évolution future, s’il y a le cadre légal, peut aller jusqu’à dématérialiser le dossier médical de l’assuré, comme ça se fait ailleurs, et avoir un dossier médical partagé, sécurisé. Mais le premier stade de demain, sera d’abord l’utilisation de l’IA pour améliorer encore plus certains schémas déployés, comme pour le cas de la lutte contre la fraude
François Olivier Edime – 212assurances – Entretien réalisé le 05 octobre 2023
